Crok Paris N°3
décembre 2010/janvier 2011

Rencontre
William Sheller : "Je suis un diseur comme disait Barbara !"
(par Ludovic Bourreau )

 

Festival de dates parisiennes pour le créateur des Filles de l’aurore…On le retrouve ainsi le 04/12 dans les salons de l’hôtel Crillon, le 06/12 à Bobino, le 08/12 à La Cigale et le 10/12, salle Gaveau. Sans oublier la préparation d’un album qui devrait sortir en avril 2011. Rencontre en totale connivence au Zebra Square !


- « Vous avez voulu ce spectacle très épuré, piano/voix ! »
- « Une épuration totale puisqu’il n’y aura qu’un piano. Je sors d’un truc avec orchestre symphonique, ça fait du bien de se retrouver seul avec l’instrument. Le contact avec le public sera donc différent, plus humain, axé sur la rencontre. »

- « Les confidences que vous faites sur scène au public, c’est important ? »
- « On m’a souvent demandé d’où venaient mes chansons. Chacun se les approprie et c’est normal mais ce qui se disait n’avait parfois rien à voir avec mes propos, ça leur permet donc de comprendre le pourquoi des choses. J’explique sur scène ce que j’ai pu observer et parfois des choses me viennent tout seul. »

- « Pourquoi le choix de plusieurs salles à Paris ? »
- « Nous discutions avec le producteur et avons lancé des lieux complètement improbables, comme le musée Grévin, où Desproges était passé. C’est drôle, rien n’empêche d’être assis à côté d’Aznavour ! Ou encore les salons du Grand Hôtel de l’Opéra, une ambiance totalement différente. Bobino également, la première salle où j’ai chanté et où j’ai eu l’occasion, petit, de voir Brel. Dans ses studios, j’ai également enregistré avec Barbara. Des lieux plus démocratiques comme La Cigale, où je n’ai jamais joué mais vu les Rita Mitsuko et Delerme. Le Palace enfin où j’ai passé des nuits entières ! »

- « Le choix des titres que vous jouerez… »
- « Il sera différent en fonction des lieux. Un soir tout le monde me disait : "Pourquoi  pas celle-là, et celle là.. ", nous avons joué 4 heures soit 40 chansons au théâtre des Champs-Elysées avec les 18 musiciens. »

- « Comment vous est venue l’idée de concerts dans des hôtels de luxe en comité restreint ? »

- « Et pourquoi pas ? Au 19ème siècle on jouait dans des salons, on allait se rafraîchir en écoutant Chopin. C’est une autre ambiance que j’avais expérimentée en Chine, dans un club très luxueux, devant l’ambassadeur de France et des milliardaires chinois. Je me suis aperçu que ce n’est pas si difficile, tout comme jouer dans un festival en plein jour et voir les personnes de près ».

- « A 10 ans vous vouliez devenir un petit Beethoven ! »
- « Enfin… je voulais être musicien comme lui. J’avais trouvé mon truc, rien d’autre ne m’intéressait ! J’ai eu la chance que mes parents soient d’accord et me donnent des professeurs, car tout seul on va moins loin. J’ai eu le bol de rencontrer un élève de Gabriel Fauré, il fallait que j’écrive tout à la table, sans piano. »

- « Enfant vous avez été baigné dans un univers artistique, ça vous a marqué ? »
- « Très profondément, oui ! Avec une grande-mère ouvreuse et un grand-père décorateur à l’Opéra j’ai commencé à connaître le métier par les techniciens et les machinos. Quand j’ai commencé à écrire j’ai repensé à ça, je n’ai jamais voulu être une star, seule la musique m’intéressait. Je veille toujours à ce que les techniciens soient aussi bien traités que les musiciens ou moi-même. C’est comme une troupe, c’est tout ce que j’aime. Les musiciens choisissent également qui va jouer avec eux. »

- « Vous avez toujours aimé vous imprégner de nouveaux courants ! »
- « Je n’ai pas envie de me bloquer dans un genre, c’est la musique qui m’intéresse, j’ai été élevé à Elvis, aux Beatles et au jazz ! Je vais chercher les musiciens qui s’y connaissent, il faut savoir s’entourer. Je ne me sens pas défendre qu’un seul style, je ne suis qu’un musicien, si ça vient comme ça ! Je m’inspire de ce qui est dans l’air, les musiciens captent des choses. En 1969, j’ai écrit quelque chose pour un mariage, qui n’est sorti qu’en 1972, on m’avait alors dit que j’avais pompé les Pink Floyd sortis entre temps. C’était dans l’air, c’est tout. »

- « Vous êtes autant à l’aise dans l’écriture des textes que des musiques ? »
- « Le musique me vient toute seule, je l’entends. Une phrase peut me venir, mais que mettre autour ? Pour moi, l’écriture des textes est un gros travail d’épuration, de maniaquerie. J’essaie de dire les choses avec un minimum de mots et un maximum d’images.  Je ne lâche pas tant que ça ne sort pas de la bouche avec facilité. J’ai essayé de faire appel à des auteurs, mais ils veulent parfois mettre deux mots quand je n’en veux qu’un seul ! »

- « Vous vous voyez plus comme musicien que chanteur ? »
- « Je ne suis pas un chanteur à vocalises, je suis un "diseur" comme disait Barbara. Quand une bonne femme comme ça te dit que tu devrais chanter, tu fais un essai ! Ça fait 30 ans que ça dure. Sacha Guitry disait également de Mireille dans les années 30 : "C’est une artiste qui a le bonheur ne ne pas être encombrée d’une bonne voix !"»

- « Quel est votre public aujourd’hui ? »
- « J’ai des salles très mélangées, il y a de tout, du jean, du tatou, j’ai même eu des Drag Queen récemment, c’est bien ! Mes chansons sont des mélanges, elles ne s’affirment pas dans un seul style. Je ne cherche pas à révolutionner, il y en a assez qui s’en chargent. »

- « Vous vivez près d’Orléans, pourquoi ce choix ? »
- « On m’avait présenté un graphiste pour Les machines absurdes qui y habitait. J’ai visité Orléans et trouvé ça chouette ! J’ai ensuite dit à mes fils : "Pourquoi s’enfermer dans une tour à Paris ? " J’ai joué également à Sully, qui m’avait commandé une symphonie. J’y ai joué un concerto également, ça me détend et me change des chansons qui m’obligent à écrire des textes ! »