L'Aisne nouvelle
15 octobre 2010
-interview avant concerts piano-solo à Saint-Quentin et Amiens-

Musique
William Sheller : "Une veillée à l'ancienne"
(par Eric Baillon)



William Sheller sera en concert « Piano solo » le 20 octobre à Saint-Quentin, puis à Amiens le jour suivant.


Pianiste accompli, c'est seul face à cet instrument que William Sheller a souvent su imposer ses mélodies dans leur plus grande nudité, et ses mots dans leur plus évidente simplicité. En musicien et chanteur libre, il répond à nos questions.

- « Durant votre carrière, les projets se sont suivis sans se ressembler, entre musique symphonique et rock… Comment arrivez-vous encore aujourd'hui à être aussi inspiré ? »
- « Ce qui vient me chanter dans la tête ne se soucie pas de savoir dans quelle niche musicale cela peut être rangé. Moi non plus. Si cela me plaît, je le mets en forme et cela devient ce que cela devait devenir, un quatuor à cordes ou une chanson. Ou encore quelque chose d'hybride, parfois comme une musique de film où j'y insère un personnage que j'interprète en chantant son histoire. Je n'ai pas vraiment de secret. Avoir le sens de la mélodie est quelque chose d'inné. On peut faire de très belles chansons sans savoir une note de musique. Cela ne s'explique pas, ni peut se transmettre. »

- « Ce qui est remarquable, c'est que vous avez toujours travaillé en conformité avec vos envies, sur des projets parfois métissés, parfois plus conceptuels, comme le dernier en date Avatars. Est-ce difficile d'évoluer musicalement, sans tenir compte des effets de mode, du "music business" ? »
- « Je travaille en musicien, et comme je le sens tout simplement. Faire "carrière" ou défendre un créneau en me cantonnant à un genre m'ennuierait beaucoup. Je vis de belles aventures humaines en collaborant avec des musiciens d'horizons différents. Avec Avatars, j'ai joué avec la musique en lui donnant des parfums classiques ou des sixties tout en y insérant des personnages surréalistes. J'y travaille sérieusement et beaucoup, mais je ne me prends pas au sérieux du tout. Vous savez, je suis compositeur de musique, et le vedettariat avec ses promos, ses photos, ses clips, cette nécessité de chercher encore et toujours à faire parler de soi fait perdre un temps précieux pour écrire. La mode passe, la musique reste. »

- « Comment vous est venue cette passion à la fois pour la musique classique et la chanson plus populaire ? »
 « Comme souvent par les parents. Beaucoup de jazz par mon père, et beaucoup de classique par mes grands-parents qui travaillaient au Théâtre des Champs-Élysées à Paris. Musique classique mais aussi flamenco, ballets africains, opéras, musique asiatique etc. J'ai été nourri par tout ça à la base et par le rock aussi plus tard. »

- « Pourquoi n'avoir jamais vraiment fait un choix entre tous ces genres ? »
- « Je n'ai pas fait de choix parce que je n'en sentais pas le besoin, il n'y a pas de réponse plus bête que ça, je vous l'accorde, mais je n'ai jamais eu l'occasion de le regretter depuis 36 ans. »

- « Parlons un peu de la tournée "Piano solo". Pour quelles raisons privilégiez-vous cette forme de prestation ? Est-ce que c'est une manière de tourner plus librement, ou alors de retrouver votre public, en toute intimité ? »
- « Oui, intimité avec le public qui d'ailleurs semble me le demander. D'ailleurs le mot public me gène, je dis "les gens". J'aime parler avec eux, raconter le pourquoi d'une chanson, à cause d'une anecdote. C'est un peu passer une soirée musicale ensemble, comme une veillée à l'ancienne. C'est une formule légère qui me permet d'aller partout, jusque dans des coins retirés où l'on voit peu d'artistes un peu consacrés par des chansons connues et avec "de la bouteille" si je peux dire. J'ai privilégié cette formule depuis qu'à la suite d'un problème de douanes, il y a longtemps, mes musiciens ont été retenus à la frontière belge. J'ai dû donner un concert à Bruxelles seul au piano et ce fut une révélation. D'autre part, les grosses machines orchestrales sont bien plus lourdes à monter et demandent de plus grandes scènes. »

- « Je suppose que vous allez interpréter vos plus grands succès… »
- « Bien sûr et c'est ce que l'on vient écouter d'abord. Les uns pour les souvenirs, les autres par découverte, je vois des gens de tous les âges et de tous les genres quand je regarde la salle et ça me plaît. Mais je joue aussi des chansons moins connues. En tout cas je ne peux pas ne pas jouer Un homme heureux ce serait risquer de me faire rouler dans le goudron et les plumes à la sortie du théâtre ! »

- « J'ai entendu dire que vous prépariez également un nouvel album. Est-ce vrai ? »
- « Oui, en ce moment ça me grouille sous les doigts, dans le piano… et en attendant d'avoir terminé une grosse partition à réaliser plus tard, j'ai envie d'un album très intime, juste piano voix, sans effets de réverbération ou autre. Peut-être pour me changer de Avatars et des studios de Londres. »

- « Après ces concerts en Picardie, vous avez également en projet de faire sept dates sur Paris, dans sept salles différentes. Pourquoi le chiffre sept et pourquoi changer sept fois de lieux ? »
- « Je souris à cette question parce qu’il n’y a vraiment là rien de mystique. Mais qui sait ? Nous en avions dix en vue et finalement cela s’est réduit à sept. Pour le reste c’est là aussi une envie toute simple. Jouer "dans" Paris et pas toujours là où "çà doit se passer", aller à l’aventure, faire découvrir des lieux étonnants. Sortir des formatages en tous genres... »
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PRATIQUE :
William Sheller - Piano Solo
- Saint-Quentin : le Splendid
Mercredi 20 octobre, 20 h 30. Tarifs : 38 à 35 €.
- Amiens : Auditorium Mégacité
Jeudi 21 octobre, 20 h 30. Tarifs : 43 €.