THÉÂTRE GEORGES-LEYGUES. William Sheller ouvrait hier
soir la saison culturelle. Au piano et avec bonheur.
Ses premiers
mots vont vers son piano. Superbe, à queue, laqué de noir, brillant
dans l'obscurité. Il est important ce piano. Il lui a manqué. Il
le retrouve et nous avec. Avec bonheur aussi.
Chemise et pantalon noirs,
teint halé, William Sheller s'est baladé hier soir au théâtre
Georges-Leygues curieusement pas plein. L'auteur, compositeur, et aussi interprète
donc, porte bien ses 60 ans. Il n'a toujours pas son permis de conduire - et en
est plutôt fier - et ses textes d'aujourd'hui sont aussi bons que ceux d'il
y a trente ans. Le récital donné hier soir, pour l'ouverture de
la saison théâtrale d'ici, le rend bien.
Ce qui ne change pas
fondamentalement, c'est cette capacité rare à conter des histoires,
des tranches de vie. Souvent mélancoliques mais jamais réellement
tristes. Parfois désabusées mais pas cyniques. Nostalgiques mais
pas figées. «II n'y a pas que les Bretons qui le disent, il pleut
tout le temps dans mes chansons», admet-il en prenant la salle à
témoin.
Ce type qui court. Ce fils de jazzman américain, de
son vrai nom William Hand, apprécie l'automne et en parle bien. Tout finit
presque par s'y rattacher. Les poireaux de la voisine Yvonne, ce visage inconnu
à suivre pour deux jours, ces jours où il n'y a personne dans la
rue, ce type qui court, en pyjama et à côté d'un train...
Ce
type là, «qui court toujours tout seul», on le connaît
bien, presque aussi bien que lui. En revanche, pas pareil, sur une composition
nouvelle. Quand il «bouffe la fin», pas question de la lui souffler.
Mais, aussi pour cette fin bouffée, on a été contents de
le voir.