La Voix du Nord
(édition de Roubaix)
22 février 2005
-interview avant un concert au "Nouveau Siècle" de Lille le 26 février 2005-

Chanson
William Sheller fêtera (aussi) ses 30 ans de carrière, samedi 26 février, au Nouveau Siècle à Lille

« Je peux un peu moins mais j'en sais un peu plus »

(par Anne Tomczak)



- « C'est plutôt original de répondre à une interview par e-mail... Pourquoi ce choix ? »
- « Par commodité tout simplement, les technologies nous permettent de pouvoir répondre d'où que l'on soit et à n'importe quelle heure, profitons-en. »

- « C'est votre côté un peu sauvage, voire un peu misanthrope ? »
- « Je ne suis pas particulièrement optimiste quant à l'homme, c'est vrai, mais je ne suis pas un sauvage en fuite, loin de là. J'ai des amis, des fêtes, des fous rires, des petits-enfants à quelques kilomètres de chez moi que j'adore avoir à la maison. »

- « Après trente ans de succès, vous ne vous êtes toujours pas habitué au vedettariat ? »
- « Non et je ne m'y ferai jamais. Il y a d'une part la vie de tous les jours et d'autre part le Sheller sur scène. Je fais personnellement la différence, mais il y a parfois des moments de clash. Dans la rue, en jogging, quand je fais mes courses, on me croit encore sur scène si je peux dire... là ça m'angoisse.»

- « Est-ce pour mieux goûter à la solitude que vous vous êtes installé en Sologne ? »
- « Je me suis rendu compte de ce qu'il m'arrivait quand je restais dans mon appartement parisien sans sortir pendant une semaine. Pourquoi ne pas plutôt aller à la campagne et pouvoir jouer du piano à minuit toutes fenêtres ouvertes et me rapprocher de la maison de mes enfants ? »

- « Avant votre tournée, vous avez donné une dizaine de concerts aux Folies-Bergère. Quel accueil avez-vous reçu ? »
- « C'est délicat, on peut avoir l'air de se vanter... Ce que je sais c'est qu'ils étaient debout et en redemandaient encore après 2 h 40 de musique. Ce sont de très fortes émotions que celles-là.»

- « Pourquoi inviter dix-huit musiciens sur scène, alors que vous venez de sortir Épures, au piano solo ? »
- « Parce que je ne voulais pas être seul pour fêter mes 30 ans de chanson sur scène. Est-on obligé de suivre ce formatage show-bizard qui consiste à faire une tournée-promo après la sortie d'un enregistrement ? Épures, c'était hier, aujourd'hui c'est autre chose. »

- « Vous y cultivez votre penchant pour la mélancolie. Cette petite musique est-elle pour vous la musique du bonheur ? »
- « Je suis mélancolique, moi ? Oh non... Mes personnages dans les chansons peut-être. Ce serait bien si on finissait de croire que dire JE dans une chanson implique fatalement l'auteur ! Les artistes sont des témoins de leur temps. C'est un parfum de la mélancolie urbaine qui s'en dégage. Ce n'est pas ma vie. »

- « Une impression familière se dégage d'Épures. On y retrouve un climat, des tranches de vie, des voyages immobiles qui sont votre marque de fabrique. Votre univers, comment le définiriez-vous ? »
- « Hou la question piège ! Je saurais reconnaître aux premières notes du Michel Berger ou du Renaud, mais par quelle chimie je ne saurais le dire. C'est comme porter une eau de toilette que seuls les autres peuvent sentir. »

- « Dans les années 90, vous avez travaillé avec l'ONL et Casadesus. Cette rencontre a-t-elle compté ? »
- « Beaucoup ! Nous avons même donné une dizaine de concerts hors de Lille avec ce magnifique orchestre. Jean-Claude a été un des premiers à diriger mes partitions et à me faire confiance. Je ne peux que saluer son éclectisme et les prises de risque que cela représente. »

- « Le cap des 60 ans se profile à l'horizon pour vous. Le considérez-vous avec inquiétude ? »
- « Oh non ! Je me sens infiniment mieux dans ma peau qu'à 30 ans. Je peux un peu moins mais j'en sais un peu plus. Finalement c'est un bon équilibre, non ? »

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Samedi 26 février (20 h 30) au Nouveau Siècle, place Mendès-France à Lille.