L'Humanité
4 février 2005
-Concerts aux Folies-Bergère du 1er au 12 février 2005-

Culture
Orchestral Sheller

(par Victor Hache)

 

SPECTACLE. Entouré d’un orchestre de dix-huit musiciens, le chanteur fête ses trente ans de carrière aux Folies-Bergère.


Cela fait belle lurette que les Folies-Bergère ne sont plus le temple des revues de plumes et de strass. Dans un registre moins coquin, on peut y voir en ce moment un chanteur qui fait honneur à la chanson française. William Sheller a choisi ce haut lieu du music-hall où il présente son nouveau spectacle, après la sortie cet automne de l’album piano-voix Épures. Il revient avec une formule plus étoffée, entouré d’un orchestre de dix-huit musiciens. Un écrin à l’image du «Symphoman» qui a toujours aimé marier chanson et instruments classiques, rock et arrangements contemporains. Il fête «trente ans de chansons». Décontracté, il s’installe au piano à queue, invitant à revivre les plus belles compositions d’une carrière qui débuta avec Rock’n’dollars. Le tube écrit dans les années soixante-dix avait été sélectionné parmi «les chansons les plus idiotes de la semaine», rappelle-t-il. S’il lui colla longtemps à la peau, il illustre les années «ketchup» du chanteur et sa manière humoristique de faire rimer les mots à consonances anglo-saxonnes («hamburger» et «chopper»).
Las de son image de chanteur rigolo, il s’est aventuré depuis vers la chanson à texte (Nicolas, Un homme heureux, Le Nouveau Monde) aux mélodies souvent rehaussées d’une importante partition orchestrale. Aux Folies, il fait la part belle aux instruments emmenés par le violoniste Nicolas Stevens.
Né dans une famille de musiciens - son père était bassiste de jazz -, William Sheller étudia le piano dès l’âge de douze ans. Il rêvait d’être Beethoven. À la Schola Cantorum et au Conservatoire, il apprend la composition, l’harmonie et le contrepoint. Jusqu’au jour où, adolescent, il découvre le Hard Days Night des Beatles. Dès lors, on saisit mieux pourquoi il apprécie le mélange de la pop et du classique.
Place donc aux violons et violoncelles, au saxophone, au basson et à la flûte traversière, instruments qui ne sont pas uniquement là pour accompagner le chanteur à la voix blanche, mais pour magnifier son univers. Trop sage, la première partie du spectacle pèche par ses bavardages. Un sentiment vite dissipé après l’entracte où le chanteur se lâche enfin, accompagné par un saxo survolté (excellent Rhony Ventat) sur Oh ! J’cours tout seul, avant que ne s’envolent les subtiles ambiances orientales d’Indies. Il y a un contraste entre le côté Tintin reporter du chanteur et ses mélodies mélancolie. C’est dans ce mystère que se révèle la sensibilité d’un bel artiste.

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Aux Folies-Bergère jusqu'au 12 février.

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