Comment viennent les chansons ? Samedi soir, aux Arc de Quéven, 900 personnes sont venues écouter la leçon de chansons, orchestrée par le couple William Sheller et son piano. Première chose à faire : Posez les mains sur le piano. Noir et à queue, de préférence. Laissez aller les souvenirs. Une soupe aux poireaux. Un jet d'eau à Genève. Un réveil qui fait tic-tac. Un opéra (Madame Butterfly en l'occurrence). Un inventaire à la Prévert, où tout est prétexte à chanson. Il y a en pour qui, une réflexion, une odeur, un mot saisi au vol restent lettres mortes. William Sheller, lui, assemble les lettres. Qui deviennent des mots. Qui deviennent des notes. Qui deviennent une chanson. Une ritournelle d'enfant entendue d'une chaise longue au fond du jardin devient Maman est folle. Un jardin, une grille : Les petites filles modèles. La voisine qui sent la soupe aux poireaux, Une chanson lente. Tout est matière à chanson. Surtout les petits riens de la vie. Les bleus et les bosses à l'âme aussi. « Un monde bizarre » que celui de William Sheller. Dans lequel le public des Arcs a plongé corps et âmes. A force de faire grimper tout le monde sur ses échafaudages de notes et de mots, le public se rapproche tout près de son univers, où il y a parfois des gens « pas nets ». Sa vie, c'est celle de tout le monde. Intime, touchant, un peu monotone parfois. Sauf quand il chante une chanson du temps « où il se faisait un brushing pour aller chez Guy Lux », où il est question d'un bon vieux rock’n'roll. Il manie l'auto-dérision si sincèrement qu'il devient le genre d'ami idéal, avec qui on imaginerait partager facilement ses soirées. Pour être un homme (une femme) heureux (heureuse).