Au premier regard, William Sheller, c'est une bouille à la Tintin surplombant une silhouette de dandy précieux. Une sorte de lutin triste qui aurait, en dépit des années, conservé au fond des yeux le souvenir de cette mélancolie propre aux enfants rêveurs. Hâtif portrait-robot qui masque l'essentiel : un auteur-compositeur diaboliquement doué, rare Français à savoir conjuguer sophistication et accessibilité.
Une dizaine de jours après la sortie des Machines absurdes – sans doute son meilleur album à ce jour – William Sheller vient d'en donner une nouvelle preuve à l'Octogone de Pully.
Volontiers babillard malgré une mauvaise grippe, le chanteur a emmené deux heures durant une troupe au sein de laquelle on pouvait notamment reconnaître six violons, un violoncelle, une contrebasse, un basson, quelques cuivres, deux guitares, une batterie, une flûte traversière et un piano.
Aux antipodes de la formule qui a fait son succès, Sheller le solitaire a livré sur des arrangements totalement inédits un florilège d'anciennes chansons (Le carnet à spirale, Maman est folle, Un homme heureux...) et de titres nouveaux, dont Moondown, Sunfool ou encore le remarquable Indies, escapade ingénieuse sur une gamme indienne.
L'artiste respectant au moins autant ses musiciens que son public, on a pu distinguer chaque frottement d'archet, chaque inflexion de voix sans être assaillis par un volume sonore excessif. Un trop rare privilège qui compte probablement pour beaucoup dans le triomphe réservé au chanteur par le public plutôt guindé de l'Octogone, qui a montré là, sans jamais perdre sa tenue, tout l'enthousiasme dont il est capable...
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* William Sheller était en concert samedi à l' Octogone de Pully.
* Les Machines absurdes par William Sheller (Mercury/Universal)