Résolument rock, orienté
seventies, le dernier album de William Sheller se nomme Albion. Vous ne
serez donc pas surpris d'apprendre que les sessions ont eu lieu en Angleterre,
ceci en la présence d'une équipe de choc placée sous la direction
du producteur Mark Wallis. Retour aux sources ?
Armé de solides bases
classiques - un univers dont la grande époque psychédélique,
des Beatles à Hendrix en passant par Pink Floyd..., l'éloignera
rapidement -, William Sheller est d'un rare éclectisme. Un jour entouré
d'une formation symphonique, l'autre en solo, hier outre-Manche..., ses disques
se suivent sans se ressembler : sa soif d'expériences le mène invariablement
là où personne ne l'attend.
Pour enregistrer Albion, notre homme a décidé de s'isoler, ou plus exactement, de fuir
son environnement quotidien. Pour ce faire, il a mis le cap sur la Grande-Bretagne,
pour se retrouver, comme nous venons de le dire, en compagnie du producteur Mark
Wallis (connu pour avoir travaillé avec U2, Talking Heads, Wet Wet Wet,
The Silencers, F.F.F., la Mano Negra...), mais aussi du guitariste Steve Boltz
(David Bowie, Paul Young, Phil Collins, The Who...), du bassiste Gary Tibbs (Roxy
Music, Adam & The Ants, Tom Verlaine, Keith Emerson...), et du batteur David
Ruffy (Yazz, Everything But The Girl, Prefab Sprout...). Des séances spontanées
et inspirées, qui se sont déroulées au cur de la campagne
anglaise, au studio rural et résidentiel de Ridge Farm. Nous avons eu la chance
de pouvoir évoquer ce sujet avec à la fois l'artiste et le producteur...
-
« William, d'où vient ce goût des expériences, et pourquoi
ce désir de travailler avec des Anglo-Saxons ? »
-W.S.
: « J'ai chaque fois besoin d'apprendre de nouvelles choses... Depuis deux
ans, j'avais envie d'un album électrique, qui "sonne" plus anglais qu'américain
: je ne voulais pas d'un guitariste avec huit doigts à la main gauche,
jouant des harmonies extrêmement compliquées, mais plutôt de
quelqu'un qui plaque des accords simples, qui navigue à l'intérieur
de façon horizontale, avec ce côté très britannique
qui pour moi, fait toute la différence...
Au départ, j'ai commencé
par travailler avec des musiciens français. En dépit d'excellents
résultats, je me suis aperçu qu'ils n'osaient pas vraiment bouger
: pour eux, j'avais la réputation de composer une musique bien carrée.
D'où l'idée d'aller enregistrer incognito, avec des gens qui ignorent
tout de Sheller. Leur apporter ma musique, la partager avec eux, les laisser amener
leurs idées..., c'était à mon sens le meilleur moyen d'arriver
à quelque chose. »
- « A quoi est
due ton attirance pour ce côté électrique ? »
-W.S.
: « Les violons, c'est bien, mais au bout d'un certain temps, changer, ce
n'est pas mal non plus... J'étais tenté par quelque-chose de plus
live, peut-être aussi par l'idée de me replonger dans un univers
que j'ai toujours aimé. Au milieu des années soixante, lorsque j'ai
laissé tomber mes études classiques, c'était tout de même
pour partir faire du rock. Nous avions monté un groupe qui s'appelait "The
Worst", et qui portait vraiment bien son nom [rires]. Notre intention
n'était pas d'enregistrer, mais de voir à quoi ressemblait cette
vie. A l'époque, on jouait pour trois fois rien dans les bases américaines.
Nous étions fauchés au point de piper de l'essence dans les parkings
pour rentrer...»
- « D'après
quels critères as-tu choisi producteur et musiciens ? »
-W.S.
: « J'avoue avoir eu énormément de chance. Le premier producteur
que m'a présenté ma maison de disques, après que je lui ai
parlé du projet, fut le bon. De même pour les musiciens et le studio
que Mark m'a proposé : tout a immédiatement collé. »
-
« Avant de rencontrer Mark Wallis, connaissais-tu déjà son travail
? »
- W.S. : « Oui et
non. Je ne suis pas de ceux qui sont capables de te dire qui produit qui. Par
contre, quand Phonogram m'a cité les noms des artistes pour lesquels
Mark avait travaillé, je me suis rendu compte que je possédais un
bon nombre de ces albums. »
- « Pourquoi
Ridge Farm ? »
- W.S. : « Lorsque
Mark est passé me voir à la maison, je lui ai fait écouter
quelques morceaux, en lui expliquant la direction dans laquelle je désirais
aller. A partir de là, j'ai été visiter Ridge Farm,
qui lui semblait parfaitement adapté à la situation : un studio
en pleine campagne, où tout le monde pouvait vivre, avec les gosses, les
chiens, où il suffisait de traverser le jardin pour aller enregistrer...
Inconsciemment, petit à petit, nous avons monté un groupe. D'ailleurs,
lors des séances, nous avons tous ressenti une espèce de vibration,
quelque chose d'indéfinissable s'est produit...Par contre, je n'aurais
jamais du revenir en France écrire les textes. Chaque fois que j'écoutais
les bandes, j'avais la nostalgie du studio, mais absolument pas l'envie de dire
quoi que ce soit. J'ai plus ou moins menti à Phonogram, en leur
assurant, lorsque je suis retourné enregistrer les voix, que tous les textes
étaient prêts. En réalité, je n'en avais que trois
! Arrivé à Ridge Farm, l'inspiration est revenue : pendant qu'ils
mixaient un titre, j'écrivais les paroles du suivant... »
- « Es-tu intervenu au niveau de la production, ou au contraire, Mark a-t-il
eu toute latitude de décider ? »
- W.S. : « Je l'ai
complètement laissé faire. Parfois, j'entendais des trucs bizarres
et je pensais : "Qu'est-ce-que c'est que ce bazar ?" , mais je
me gardais bien d'intervenir : je savais que Mark était en train de fouiller,
de chercher... Il n'allait pas tout me raconter.
Les musiciens ont également
eu le champ libre. J'avais besoin qu'eux aussi, me conseillent. Gary me disait
par exemple : "Ta ligne de basse est bien, elle chante, mais je crois
qu'il vaudrait mieux qu'elle soit jouée par un autre instrument. Ainsi,
je pourrais faire telle autre partie, plus en place avec la batterie, et la rythmique
pulserait mieux". On a besoin de ce genre d'avis. »
-
« Avais-tu écris beaucoup d'arrangements avant de partir pour Ridge
Farm ? »
- W.S. : « Je m'étais contenté
de simples maquettes, faites à l'ordinateur avec un sampling de batterie,
une guitare, une basse. A part quelques riffs bien précis, il s'agissait
juste d'un minimum, de quoi donner une direction. »
-
« Le fait d'être pris en main par un Anglais plutôt que par un
Français modifie-t-il les relations artiste / producteur ? »
- W.S.
: « Pas pour la musique en tout cas. Quant aux textes, je les traduisais à
Mark. Avec certaines expressions, pour lesquelles il n'existe pas d'équivalent
anglais, il fallait trouver le bon mot pour qu'il comprenne. »
-
« Mark, même genre de question : produis-tu un Français de la
même façon qu'un Anglais ? »
- M.W. : « J'ai
démarré ce projet comme n'importe quel autre, sans penser une seule
seconde que William était français. Par rapport à ma conception
des choses, la langue, le pays n'ont rien à voir avec la façon dont
on enregistre un album. Nous avons discuté du genre de disque qu'il avait
envie de faire, et nous nous sommes aperçus que nous étions sur
la même longueur d'onde quant à la manière d'y parvenir. »
-
« Quelle est ta philosophie de travail ? »
- M.W.
: « J'ai la chance d'avoir démarré ma carrière à
une époque où l'on enregistrait encore beaucoup de groupes "live".
Peut-être est-ce la raison pour laquelle je ne dissocie pas le son de l'interprétation.
Une guitare électrique sonnera toujours comme une guitare électrique...
Pourtant, si le musicien joue merveilleusement bien, il y en aura toujours pour
s'exclamer : "Quel magnifique son de guitare !", et malheureusement
pas : "Quel jeu !" En studio, je passe le plus clair de mon temps
à tout mettre en œuvre pour que les musiciens puissent s'exprimer dans
les meilleures conditions possibles.»
-
« Certaines options de production ne sont
pas sans rappeler les années soixante /soixante-dix, comme les panoramiques,
par exemple. Ainsi, sur le premier titre de l'album, la batterie est à
l'extrême gauche et la basse à l'extrême droite... »
-
M.W. : « Contrairement au vinyle, la stéréophonie du disque
compact n'est pas limitée. Paradoxalement, aujourd'hui, trop peu d'albums
profitent de cette possibilité : on se contente généralement
de mono améliorée... Pour ma part, j'adore la stéréo,
je m'efforce de conférer à la musique le plus de profondeur possible,
de recréer autre chose qu'un simple espace bidimensionnel. A l'écoute
de l'album, selon l'endroit où se trouve l'auditeur, il ne percevra pas
la même chose. Peut-être la première fois, dans son séjour,
entendra-t-il plus spécialement tel instrument, puis la seconde, depuis
sa cuisine, tel autre, etc... »
- « Dans
l'ensemble, les voix sont assez spéciales : étroites, un peu comme
au travers d'une écoute téléphonique, parfois avec du phasing... »
-
M.W. : « En plus de chercher à renforcer la signification
des textes sur un plan sonore, j'ai beaucoup expérimenté. Par exemple,
sur Excalibur, William a chanté le nez collé contre la vitre,
sur laquelle nous avions fixé des microphones de type PZM. Six mètres
en arrière, une paire de Shure SM58 pointait en direction de sa
tête. Au final, nous avons obtenu cette ambiance vraiment étrange,
un peu comme si quelqu'un prononçait un discours dans un grand hall. »
- « Avec quel matériel avez-vous travaillé
? »
- M.W. : « Une console Neve Flying Faders, dont j'aime vraiment la couleur, ainsi qu'un multipiste
analogique Studer, qui lui aussi sonne remarquablement bien. Toutes sortes
de microphones ont été utilisés : à lampes, à
ruban, des électrostatiques, des dynamiques... Je fais toujours pas mal
d'essais. Côté périphériques, nous nous sommes servis
de compresseurs Urei, Summit, de réverbérations à
plaques... Nous avons été jusqu'à installer haut-parleurs
et micros dans le bassin de la piscine (vide, NDLR), pour simuler une chambre
de réverbération. En studio, dans les années cinquante, soixante,
voire soixante-dix, les réverbs étaient naturelles : vous deviez
faire avec les pièces dont vous disposiez ! »
-
« D'autres trafics hors du commun et autres appareils bien spécifiques
? »
- M.W. : « Richard, le technicien de maintenance de
Ridge Farm, est passionné de technologie, au point d'avoir construit de
fantastiques micros et égaliseurs à lampes, des boîtes de
direct, etc. Nous avons exploité certains de ces appareils. Je lui ai même
demandé s'il pensait pouvoir nous fabriquer un compresseur dans le style
de ceux qui sont insérés sur le réseau d'ordres des SSL série
4000. Cette compression, qui ne comporte pas le moindre réglage, est au
départ censée permettre à l'ingénieur, lorsqu'il dialogue
avec les musiciens qui sont dans le studio, de tous les entendre au même
niveau, qu'ils parlent doucement ou fort, qu'ils soient éloignés
ou non du micro de "talkback". Le son est vraiment très spécial !
Deux jours plus tard, Richard revenait avec une boîte qui sonnait exactement
pareil. Je m'en suis servi pour doubler des guitares et des batteries, en traitant
un prémixage stéréo de tous les micros du kit. Si radicale,
tellement surréaliste, cette compression donne aux attaques une couleur
très particulière.»
- « A
t'entendre, tu parais accorder énormément d'importance aux expérimentations.
Certains titres font d'ailleurs penser à la période Sergent pepper's
des Beatles, en particulier l'introduction de Relâche ... »
-W.S.
: « Nous avons enregistré dans le même esprit qu'eux à
cette époque-là, en effectuant un gros travail de recherche, sans
méthode précise. »
- M.W. : « Pour réaliser
un album, je n'ai pas de règle particulière. Il n'est pas inutile
de connaître les grands principes qui régissent la musique, mais
peu importe ensuite ce que l'on en fait...Au départ, l'atmosphère
de Relâche vient d'un Clavinova qui traînait au studio.
Dans les graves, l'un des sons me fascinait. Lorsque nous avons commencé
à travailler ce morceau, après que William m'ait commenté
le texte, j'ai enregistré un bout du son en question sur la bande, persuadé
qu'il collerait parfaitement à l'esprit de la chanson. Ensuite, j'ai sélectionné
une quinzaine d'effets spéciaux sur des Compacts Discs. Certains ont été
reportés directement sur le multipiste, tandis que d'autres ont d'abord
été montés sur demi pouce, à coups de lames de rasoir.
Au final, je me suis retrouvé avec cinq ou six minutes d'un mélange
de Clavinova et d'effets sur le 24 pistes. Cette ambiance a constitué
la base du morceau. »
- « D'une manière générale, l'album est parsemé
de climats sonores assez surprenants. Je pense là encore notamment à
une introduction : celle du premier morceau... »
- W.S. : « Parfois,
Mark prenait des bouts d'instruments qu'il faisait passer dans des appareils uniquement
pour saloper le fond sonore, éviter ce trou caractéristique des
technologies numériques et du Compact Disc : du silence, du bruit, mais
pas d'intermédiaire. Avant, il y avait cet espèce de bruit de fond,
de souffle en fait. Volontairement, nous avons un peu sali les morceaux. »
-
« Mark, tu parlais à l'instant de lames de rasoir. Pourquoi découper
des bandes, alors que le montage virtuel sur disque dur procure a priori un tout
autre confort de travail ? »
- M.W. : « Le Direct
to Disk est évidemment une machine d'avenir, j'en suis persuadé.
Cependant, pour le moment, elle ne me permet pas encore de faire la même
chose qu'en analogique, comme par exemple de jouer avec la distorsion de la bande
ou de faire du montage aussi rapidement. En admettant qu'à partir de cinq
ou six prises de chant, je décide de prendre le premier couplet de la quatrième
piste, le second refrain de la troisième..., j'irais tellement plus vite
manuellement avec une simple lame de rasoir : couper la bande, recoller les morceaux,
et le tour est joué. Je ne parle même pas des multipistes numériques,
avec lesquels il faut copier des pistes de l'un à l'autre, programmer des
offsets. Pour moi, c'est trop lourd techniquement, je veux juste pouvoir me concentrer
sur la musique, ce à quoi j'arrive tellement mieux en analogique. Sans
compter la couleur sonore, à laquelle je reste très attaché. »
-
W.S. : « Je partage le point de vue de Mark. Manipuler des bouts de bande
- ce n'est pourtant pas moi qui m'en occupe - me semble tout de même moins
abstrait. Alors que d'habitude, je travaille dans des studios plutôt "cliniques",
j'ai apprécié l'analogique, non seulement pour la possibilité
de découper les enregistrements, de les écouter à l'envers,
mais aussi pour la chaleur du son. »
- « William,
tu possèdes, je crois, un home studio. Qu'y trouve-t-on ? »
-W.S.
: « J'ai chez moi le minimum -Quadra 700, S1000, Proteus Classic et MG1214-,
ce qui me suffit amplement. J'utilise Cubase, ainsi qu'un autre logiciel,
plus graphique, pour écrire la musique. Etant donné que je compose
des morceaux pour qu'ils soient joués par d'autres, pour échanger
avec des musiciens, je ne vois pas l'intérêt d'avoir plus. Cet équipement
me permet de travailler indifféremment dans tel ou tel style, aussi bien
avec les gens de rock qu'avec ceux du classique. Si je commençais à
l'augmenter, il deviendrait forcément plus précis dans une direction
ou dans une autre. La seule chose qui aujourd'hui me tente, c'est un Direct to
Disk, uniquement pour ne plus user les bandes, ne plus devoir rembobiner, pouvoir
manier l'audio avec la même facilité que les séquences. »
-
« Contrairement à certains artistes, il n'est donc pas question pour
toi d'enregistrer des prises définitives à la maison ? »
-
W.S. : « Non. D'une part, mes compétences techniques sont insuffisantes,
et de l'autre, travailler seul n'est pas du tout mon but. L'ordinateur isole déjà
beaucoup, alors si en plus, on se met à tout faire soi-même...
C'est
aussi au travers du regard de quelqu'un d'autre, que ce soit celui du réalisateur,
ou de musiciens, qu'un morceau se met à vivre. Pour Albion, certaines
chansons ont carrément dérivé par rapport à leur style
d'origine. »
- « En France, le métier
de producteur n'est pas toujours véritablement reconnu... Visiblement,
tu es de ceux qui l'apprécient à sa juste valeur ? »
-W.S.
: « Il faut bien un capitaine, quelqu'un pour piloter le bateau. Je ne sais
pas prendre le son, je ne sais pas mixer, je ne touche jamais la console, je ne
pose jamais ma main sur un bouton... Encore une fois, à Ridge Farm, j'estime
que c'était à Mark de prendre les décisions : lui seul savait
où il allait. Nous étions à sa disposition. A l'inverse,
je détesterais que quelqu'un mette ses doigts sur le clavier pendant que
je suis en train de jouer. Juste avant Albion, j'avais composé une
musique de film classique. Pour moi, il paraissait évident de s'adresser
à un spécialiste, à quelqu'un qui, en fonction des musiciens,
de l'acoustique de la pièce, sache positionner deux micros pour que l'on
entende parfaitement tous les instruments : le piano, le violoncelle... Si j'avais
voulu faire du funk, du rythm'n blues, j'aurais fait appel à quelqu'un
de compétent dans ce style, cela paraît évident. Savoir s'entourer
est essentiel. Une fois que l'artiste se sent en confiance avec le producteur,
c'est pour lui une sécurité terrible. »
-
« Nous n'avons pas encore parlé composition. Ta maîtrise des
techniques d'écriture classiques t'influence-t-elle d'une certaine façon
? »
- W.S. : « Non. Le musicien qui compose "pré-entend"
quelque chose qu'il va chercher sur son instrument. Par rapport à lui,
j'ai l'avantage de pouvoir coucher sur du papier à musique ce que j'ai
dans la tête, c'est tout... Par contre, l'écriture pour orchestre
demande d'autres connaissances. Ainsi, c'est au compositeur d'équilibrer
les différents instruments, puisque par définition, ils ne seront
pas mixés. En fait, on écrit le mixage avec le crayon. L'idée,
ce serait de composer pour orchestre, en s'affranchissant de ces contraintes d'équilibre,
de ce souci de mixage acoustique, c'est-à-dire d'avoir la possibilité
d'enregistrer en multipiste, de traiter un violon comme on traite une guitare,
de lui rajouter de la distorsion, de l'écho, du phasing, de l'égaliser,
d'utiliser différentes réverbérations... »
-
« Pour en revenir à Albion, tes harmonies ne sont pas celles
du rock traditionnel... »
- W.S. : « J'ai voulu conserver
les sons purs de cette musique, tout en modulant beaucoup. On s'attend à
ce que le prochain accord soit celui là, et hop, c'en est un autre. Dans
la musique, les lois ne sont pas toujours là où l'on croit. Affirmer
que tel accord doit suivre tel accord, ce n'est pas vrai. Le tout est de savoir
qu'à partir du moment où l'on décide de sortir des sentiers
battus, on risque d'être confrontés quelques accords plus loin à
une situation difficile, dont il faudra savoir se dépêtrer... En
fait, il n'y a pas de règles. Parfois, lorsqu'au même endroit, on
se retrouvait avec des guitares dans deux tonalités différentes,
Steve regardait ce que j'avais écris. A l'écoute, ça fonctionnait
! Il lui arrivait alors, plutôt que de jouer deux parties, de me proposer
un accord qui englobait l'ensemble : c'était exactement ce que je voulais
entendre, mais sans savoir comment le formuler. »
-
« Tu n'as pas l'intention de refaire un jour quelque chose d'aussi simple
que ton premier tube, Rock'n'dollars ?»
- W.S. : « Surtout
pas ! A l'époque, j'avais composé cette chanson pour me moquer de
celles qui utilisaient systématiquement des mots en anglais. En France,
les productions de la fin des années soixante, c'était quelque chose.
Alors que nous avions enregistré ce titre en cinq minutes, juste pour rigoler,
tout le monde l'a pris au premier degré. Tu ne peux pas imaginer le mal
que j'ai eu par la suite à me débarrasser de cette étiquette.
Une fois m'a suffi. »
- « Des projets en perspective ? »
- W.S : « Je dois terminer une symphonie pour l'Orchestre des Concerts Lamoureux d'ici le 24 mars, et après, vacances... »
- « Peut-être vas-tu tourner ? »
- W.S : « Bien sûr, mais avec tous les musiciens de l'album. Pas question d'en prendre d'autres. »