MCM.17.00
PARISTROÏKA : William Sheller
-----
William Sheller slalome entre les genres pour une musique de plus en plus affinée.
« Le musique est l’art de décorer le silence des autres, mais il n’existe pas une seule manière de le faire ». Petit-fils d’un décorateur de théâtre, William Sheller, 46 ans, n’a de cesse d’explorer ces diverses manières. Jugez plutôt. Un jour on le découvre en fabricant de tubes : cela donne My year is a day, succès de l’été 1966 (1), composé pour les Irrésistibles, ou Rock’n’dollars, qu’il interprète lui-même en 1973 (2) et qui se vend à 500 000 exemplaires. Un autre jour, on le retrouve en chanteur haut de gamme qui n’hésite pas à partir en tournée avec un…quatuor à cordes. Les fans du début se dérobent, mais un vrai public de fidèles se constitue : « J’avais travaillé quelques années dans le Formica, là, je me lançais dans l’ébénisterie. » Quelques années plus tard, bousculant toutes les barrières, il s’offre même un sacré luxe : sa Suite française est créée en clôture du Festival de musique classique de Radio France de Montpellier ! Ni plus ni moins !
Mais danser un paso-doble avec le rock, la chansonnette et le classique est un jeu dangereux. A la fin, on finit par ne plus savoir où vous êtes vraiment. Arrive alors, l’été dernier, Un homme heureux. Une chanson un brin nostalgique, avec des mots tout simples, interprétée au piano « En solitaire ». Surprise, c’est le sacre ! La rencontre tant attendue avec le public et la reconnaissance, enfin de cette industrie du disque qui ne l’a pas toujours soutenu. Résultat : quatre cent mille CD vendus, deux Victoires de la musique, celle de la chanson et celle de l’album de l’année. « On a été un peu dépassé par les événements, reconnaît-il aujourd’hui. Dans le métier, un morceau de piano qui fait un carton, ce n’est vraiment pas dans les habitudes. Mais ça prouve au moins que le show-business réserve encore des surprises. » Pensez-donc : un album enregistré en un après-midi, qui cartonne au TOP 50, on n’avait jamais vu ça !
« Quand on tient quelque chose, on s’y tient », a-t-on dû lui souffler dans l’oreille. Mais Sheller n’est vraiment pas du genre à exploiter bêtement un filon : il préfère les chemins de traverse. Cet été, par exemple, il a choisi de partir en tournée avec le Grand Orchestre national de Lille, dirigé par Jean-Claude Casadessus. Encore une manière d’échapper à toutes les classifications. Une obsession qui le taraude depuis qu’il a 12 ans. A cet âge, il apprend, avec un élève de Fauré, la composition, l’orchestration, l’harmonie et le contre-point. Au même moment, chez une copine, il découvre Elvis et les Beatles. Entre « la grande musique » et « la musique de sauvages », il n’a jamais su -ni voulu- choisir.
-----
Notes du site :
1) En 1968
2) En 1975