Chanteur pop à tendance classique, William Sheller cultive ses différences
A l'heure où Johnny et Véronique Sanson découvrent les vertus des grands orchestres philharmoniques, William Sheller, qui s'est offert cent musiciens pour le palais des Congrès de Paris, se lance dans une nouvelle tournée avec une formation de quinze musiciens belges. Faisant suite à Ailleurs, son album le plus radical, avec des chansons de plus de huit minutes lorgnant vers le classique, cette tournée pourrait précéder un retour à l'électricité. En attendant, il parle.
Classique. « Curieusement, les gens du rock et de la chanson sont les seuls à être dérangés par mes "«tendances" classiques. Les musiciens classiques, eux l'acceptent très bien. Aux Etats-Unis, mes disques sont classés dans la rubrique "new age". Pour moi, la musique doit être une forme de cinéma à entendre. »
Tournée. « Pour cette tournée, il y aura quinze musiciens liégeois et bruxellois sous la direction de Jean-Pierre Catoul, un vieux complice. Nous avons choisi ceux-là pour leurs qualités musicales et pour leur aptitude à vivre en groupe. J'aime bien connaître tout le monde, vivre avec les musiciens. C'est important pour moi de voir la tête de l'instrumentiste pour lequel j'écris. »
Répétition. « Une semaine, c'est suffisant. C'est le grand avantage avec des musiciens sachant lire la musique. Chacun peut travailler de son côté et on se donne rendez-vous au tas de sable en fin de semaine. »
Scène. « On retrouvera mon répertoire habituel et puis aussi quelques inédits parce que je pense que le public qui se déplace pour venir nous voir en concert à droit à quelque chose de plus, rien que pour lui. »
Classement. « J'ai toujours eu le cul entre deux chaises. Je me sens européen et américain, classique et rock... Alors j'ai fini par me faire une chaise bien à moi avec les morceaux des deux autres. »
Futur. « Là, j'ai envie de faire un album électrique. Au palais des Congrès, j'ai eu l'impression que le marbre commençait à me prendre le buste et je me suis rendu compte que tout cela devenait trop sérieux. Un peu après, j'ai entendu du hard-rock chez des amis et ça m'a fait un bien fou, cette élégance du mauvais goût. »
Choix musiciens. « Au Congrès, j'aurais pu prendre un orchestre de l'Est comme tout le monde parce que c'est à la mode, qu'ils sont disponibles et surtout bon marché, mais ça ne m'intéresse pas parce que je voulais des musiciens classiques ouverts à la musique actuelle. Des gens qui ont aussi dans l'oreille du rock, du jazz, ce qu'on entend à la radio. C'est plus cher mais ça colle mieux à la musique que j'entends faire. »
Thème. « C'est vrai que je suis assez attiré par l'"heroic fantasy", par ce qui est étranger au quotidien. J'en ai marre de ces gens qui prétendent chanter la rue. Qu'est-ce qu'on connaît de la rue quand on est dans le show-biz ? Au début OK, on crache ce qu'on a sur le cœur. Puis 10 millions tombent sur votre compte en banque et forcément on change de vie. Des gens comme Trust et Téléphone l'ont compris et ont eu le courage d'arrêter. »
Certitudes. « Plus on sait, plus on doute et moins on devrait en dire. Je me méfie du militantisme dans la chanson. Il est peut-être facile de se tourner vers le rêve mais j'en ai marre de devoir être social. On peut quand même encore avoir le droit de ne pas avoir les pieds sur terre. »
Image. « Ouais, les gens se sont dit : "Qu'est-ce qu'il lui prend, il fait une chimiothérapie, il s'est inscrit au Front National ?" Pour moi, c'était un gag mais ça n'a pas vraiment été compris surtout en France. Ici, deux Flamands qui ne me connaissaient pas ont travaillé sur mon clip et en voyant mon image, ils se sont dit : "Celui-là, ça doit être un rigolo." Le pire, c'est que la photo sur l'album... ce n'est pas moi. C'est un portrait un peu flou de Maïakovski. C'est vrai qu'il a la même tronche que moi là-dessus. Tant mieux, j'adore les surréalistes. »
Rêve. « J'aimerais créer un spectacle qu'on vienne voir uniquement pour découvrir quelque chose de neuf. Mais en France, il faut d'abord faire mousser l'eau plate avant de la boire. Et puis j'ai un projet d'opéra-rock avec Druillet. Un plan à la Wagner rencontrant le "space opera". »
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Au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles le 10 octobre, au Forum de Liège le 11 et au Théâtre royal de Mons le 12.