24 Heures
19 janvier 1983
- Article précédant une émission musicale enregistrée et diffusée en direct le soir même à la Télévision Suisse Romande-

Aquarelles musicales
(par Michel Caspary)

 

TVR, ce soir, 20.05
Si William Sheller, finalement, n'avait pas choisi la chanson, c'est sans doute le monde de la peinture qui l'aurait attiré. Ses compositions sont en effet autant d'aquarelles délicatement créées, emplies de sentiments couleur pastel, aux traits finement dessinés, comme un paysage ou un visage d'une enivrante beauté mais enveloppé d'une brume aussi mystérieuse qu'alléchante. Dans ce capharnaüm sonore qu'est la musique d'aujourd'hui, on imagine facilement la peine que peut alors éprouver pareil créateur à se faire écouter. William Sheller poursuit cependant son irrésistible ascension. Signe des temps réjouissant: à la manière d'un Michel Jonasz, ses mélopées doucement swingantes, enrobées des harmonies du cœur, séduisent par leur charme lancinant, leur force tranquille et pourtant inquiète.

Jonasz-Sheller : la comparaison s'impose. Le premier a des pulsions slaves dans le sang, le second des racines américaines, mais les deux ont la passion du jazz. Le papa de William, né à Philadelphie, était d'ailleurs contrebassiste dans un orchestre de jazz ; sa femme, française, amateur éclairée de cette musique.
William, né le 9 juillet 1946 à Paris, vivra ses premières années aux Etats-Unis avant de rentrer en France et découvrir le monde du spectacle grâce à sa grand-maman, ouvreuse au Théâtre des Champs-Elysées, et à son grand-papa, décorateur à l'Opéra. Comment ne pas rester insensible à ce monde dans de telles conditions familiales ?

Les livres et les Beatles

William sera pourtant d'abord attiré par l'univers des livres. Puis les Beatles lui ouvriront les yeux sur un art plus populaire. Et c'est le coup de foudre. Dès son adolescence, Sheller décide qu'il sera compositeur. Ses premières créations susciteront hélas des commentaires aigres-doux : « Bizarre, trop en avance, bon pour les USA seulement. » N'empêche, en 1968, William Sheller connaît son premier succès grâce à un groupe américain, The Irresistible, qui chante My year is a day. La même année, il compose la musique du film de Gérard Pirès, Erotissimo.
Ce n'est cependant qu'en 1974 que William se décidera à chanter. Avec l'appui de Barbara, pour qui il signait des orchestrations, sa spécialité. En 75, premier album, premier tube, Rock'n dollars. Suivront une pléiade de 45 et de 33 tours dont Photos souvenirs, Dans un vieux rockn'roll (76), Symphoman (77), Fier et fou de vous, J'me gênerais pas pour dire que je t'aime encore et Le violonaire français, dédié à Catherine Lara (78).

Bientôt à l'Olympia

En 1980, Sheller enregistre à Los Angeles Nicolas et Oh, je cours tout seul, et signe la musique du film Retour en force. Le 4 mai 1981, à Bobino, William Sheller devient enfin musicien-compositeur-interprète- auteur-homme de scène. Une année plus tard, après la sortie d'un nouveau trente centimètres : J'suis pas bien — qui contient également les tubes Une chanson noble et sentimentale et Pourquoi t'es plus new wave  — William Sheller tente un pari : du 26 avril au 2 mai 1982, il chantera à L'Olympia. Bilan : la consécration et un double album « live » (Philips), qui confirme la richesse du compositeur — et la difficulté de la mettre en scène, voyez Jonasz également — et le bonheur, mi-nostalgie mi-euphorie, qui se dégage de ce personnage à part dans la chanson française, loin du strass et de la frime.  

SSR, 20.05, Cœur en fête.
En direct du grand studio de la Télévision Suisse Romande, Julien Lepers présente les artistes suivants : Rose Laurens, Rondo Veneziano, Laverde, Allain Turban, Lio, Claude Puterflam, Ritchy, Bénédict Gampert, William Sheller, Mort Shuman et le Grand Orchestre de la Radio Suisse Romande, dirigé par Stuff Combe...