Music géant N°17
mai 1981

L'actualité par William Sheller
(par Régine Torrent)




Au lendemain de sa première prestation sur une scène parisienne, William Sheller est plus épanoui que jamais. Son éternelle allure d’étudiant américain n’a pas pris une ride, ni le contour de ses yeux pétillants d’un humour permanent en voie de disparition dans l’espèce humaine contemporaine. Sa personnalité réunit la sagesse des philosophes et le calme des surdoués à l’affût de nouvelles données capables d’améliorer les conditions de vie de chacun. Celle de William Sheller et ses recherches tiennent en un seul mot : analyse. Analyse de la musique classique alors qu’il était encore en culottes courtes, puis analyse du rock qu’il découvre en 1964 en écoutant les disques des Beatles. Dès ce moment, ses efforts se concentrent sur la meilleure manière de marier les différents types musicaux. A ma question : « Quel évènement t’as marqué ces derniers temps ? », William Sheller répond : « Columbia est pour moi l’évènement le plus marquant depuis le début de l’année, maintenant il faut savoir si le lancement est fait pour un progrès humain ou s’il y a une histoire de stratégie de l’espace par rapport à des problèmes internationaux. Dans les domaines aériens, les améliorations ont été flagrantes pendant quelques années et puis ce fut le silence, comme si le spectacle présentait moins d’intérêt. Là maintenant, ils ont l’air de se dire que les gens peuvent se passionner à nouveau pour l’espace et ils recommencent, ou alors les Américains faisaient peut-être leurs projets pour les présenter dans leur phase finale. »
- Régine Torrent : « La course à la présidence tenait-elle une grande place dans tes dernières préoccupations ? »
- William Sheller : « En regardant la télévision, je tombais par hasard sur la campagne présidentielle, j’entendais toujours les mêmes mots répétés par les mêmes têtes. Je fais partie des Français indécis qui n’ont pas pu fixer leur choix sur un personnage. Je ne donne pas ma confiance à l’un ou à l’autre, je ne sais pas à quel saint me vouer, il faudrait autre chose et là encore, c’est facile à dire. Je préfère m’abstenir plutôt que de voter à pile ou face, et si cet acte était obligatoire, je préfèrerais payer une amende. »
- RT : « Aurais-tu voté Coluche ? »   
- WS : « Oui, parce qu’il représentait le rassemblement de gens qui refusaient les autres candidats. Je ne supporte pas non plus le côté "show-biz" autour des candidats, si j’avais été contacté pour aller chanter avec l’un d’eux, j’aurais refusé. Je ne sais pas ce que ça va donner, je m’inquiète autant que tout le monde, mais je ne vois pas l’issue, pour moi tout est confus. »
- RT : « A côté de l’actualité politique, les variétés et en particulier ton nouveau disque s’intègrent dans la presse. Parle un peu de toi. »  
- WS : « Comme d’habitude, j’ai signé la musique, les textes, les arrangements, le disque a été fait petit à petit. Un endroit pour vivre, comme son titre l’indique parle d’un coin où il ferait bon vivre. On pourrait s’imaginer une ville où il y aurait un peu plus de lumière, tout près de chez nous, sans faire des kilomètres pour atteindre le paradis terrestre. »
- RT : « Tu n’as pas l’air d’être satisfait du lieu dans lequel tu vis … »
- WS : « Mais si, j’ai la chance de vivre dans un très bel appartement situé dans un quartier agréable. J’ai voulu quitter la campagne pour habiter tout près de Paris et voir des gens dans la rue, m’installer à une terrasse pour prendre un café, etc… C’est raté. A Neuilly, il faut faire des kilomètres avant de trouver une boutique et les quartiers sont tristes. »
- RT : « A part ton déménagement sous de meilleurs cieux, quel est ton programme futur ? »
- WS : « Une tournée d’été est en préparation. J’adore la scène, j’en ai fait un peu depuis le mois de décembre pour rôder le spectacle de Bobino et là, j’ai très envie de recommencer. Je me suis rendu compte que des titres qui ne passent pas en radio peuvent recevoir un excellent accueil sur une scène, et le contact avec le public m’apporte une satisfaction décuplée. J’ai de nouveaux musiciens tout neufs qui n’ont pas ce complexe américain à la mode il y a quelques années, ils ont participé à l’enregistrement de mon dernier disque et m’accompagnent désormais sur scène. »

Musicien marginal mais confirmé, William Sheller a réussi à imposer son style composé d’éléments disparates pour former une belle unité. Il fait partie des chanteurs dont les disques sont attendus comme un évènement, pour ou contre, le « style Sheller » ne laisse personne sans avis.