Rock & Folk N°128
septembre 1977

Les disques
William Sheller
Symphoman.
Philips 9101143
(par Jean-Marc Bailleux)



William Sheller est sur un trip bien sympathique : parti de la variété la plus accrocheuse (avec malgré tout une constante recherche pour donner vie à une certaine forme de « pop-musique française », surtout au niveau de la langue), deux 33 tours conçus comme de véritables collections de simples (il en fut tiré trois du second, qui ont tous trois fait des scores non négligeables en termes commerciaux), une volonté résolue d’être « facile » et de faire plaisir, il en est arrivé, avec son troisième album, à un travail beaucoup plus ambitieux qui se donne pour objectif de créer une musique rock symphonique populaire et de qualité. Il dit : « La musique est l’art de décorer le silence des autres, mais il ne doit pas exister une seule manière de le faire. Pas de limites, pas de chapelles ! Peu importe que l’inspiration vienne du classique, du rock ou de la variété. Un compositeur vraiment contemporain doit tenir compte aussi bien de la musique "de la rue" que de celle qui est dans les livres. Il doit s’intéresser à toutes les formes musicales, et surtout ne pas se couper de la vie. » Et il suit ce qu’il dit, aujourd’hui, allant jusqu’à considérer que Symphoman est son premier véritable album de musicien et d’homme, non plus une suite d’objet froids et artificiels, fabriqués au papier millimétré et à la règle à calculer pour séduire les médias. Il y a encore de ces gadgets sur Symphoman : Hey ! docteur disco, choisi par les radios, est le plus inintéressant, mais il y a aussi Gimmick boy avec la faiblesse de son texte et les trouvailles du piano, et surtout La flash assurance limitée qui brille par ses arrangements savoureux. A ces petites choses bénignes,  il faut préférer de belles chansons où William Sheller offre plus de lui-même, entouré par une équipe d’amis parmi lesquels il faut accorder une mention particulière à Alain Suzan, dont la basse est un régal, tout le long de l’album, de finesse et d’invention. A Symphoman, je préfère Catherine, avec Catherine Lara au violon, et qui lui est dédié ; et surtout Fandango que je considère comme la plus belle réussite du disque, avec, peut-être, le discret A l’après-minuit (Ecoutez Suzan !). Cet album brille surtout par l’équilibre qu’a su créer William Sheller entre une instrumentation souvent réduite où domine le piano acoustique, et des orchestrations très riches, mais jamais pesantes ; et encore, entre la langue française et une musique enfin désengluée des tares du « yéyé ».