Longueur d'ondes
(http://www.longueurdondes.com)
19 avril 2010

Entrevues
William Sheller
(par Serge Beyer)


« On me demande souvent "Vous fumez quoi, vous buvez quoi avant d’écrire vos chansons ?" Ben, rien… J’ai juste une relation avec mon piano. Tous les matins, je vais le voir et je lui lance une note; parfois il me répond. »


William Sheller parle beaucoup pendant ses sessions « piano solo ». Son spectacle aux Bouffes du Nord ne fait pas exception. Et si le « symphoman » a maintenant les cheveux blancs, il a toujours une allure de dandy semblant tomber de la lune… Pourtant il nous tient au courant de son nouveau domicile : « J’ai quitté Paris, j’ai des biches et des cerfs qui passent dans mon jardin. Je vis en Sologne et je ne fume plus. » Il présente aussi souvent ses chansons : « Ça commence toujours par la musique qui m’emmène des images, des réminiscences. Je n’ai jamais pu commencer une chanson par le texte. » Pour Nicolas, il nous parle d’Yvonne la Bretonne et son chien jaune un peu idiot (sa voisine du 6ème quand il était enfant). Pour Loulou, il précise : « Les Bretons me disent souvent : "On aime bien tes chansons car il y pleut souvent!" » Mais voilà un chanteur qui ne revisse pas sa bouteille d’eau en plastique à chaque fois qu’il boit entre deux morceaux. Avez-vous remarqué comme quasiment tous les chanteurs ouvrent leur petite bouteille pour prendre une petite gorgée et, aussitôt après, ils la referment précieusement… Comme si quelqu’un allait monter sur scène pour venir boire dans leur bouteille d’ici la fin de la prochaine chanson… Y’à une enquête à faire sur ce comportement sociologique…

Les Bouffes du Nord c’est comme une église de pierres apparentes, c’est un lieu oscillant entre mystique et salle pour du classique, ce qui, logiquement, inspire le pianiste: « Ma grand-mère était ouvreuse et mon grand-père faisait des décors. J’ai vécu dans les théâtres très tôt. » Il raconte aussi un cauchemar récurant où il passe son temps à courir avec le haut du pyjama différent du bas, ce qui le gène beaucoup (Oh j’cours tout seul), ou encore comment Barbara à jugé sa vision de sa chanson Vienne : « Cher bidouilleur, j’aime bien ta version, tu peux la chanter. »

Mais, bien entendu, l’homme ne fait pas que parler ! Il revisite tout son répertoire d’excellente façon, tour à tour sur le ton tendre de la confidence, ou sur celui, plus énervé, de la passion. Grandiloquent, il sait l’être aussi quand il le faut. Ce qui évoque aux afficionados ses mémorables concerts avec orchestre de cordes ! Ce qui frappe aussi, c’est que le temps ne semble pas avoir d’emprise sur sa voix, sur sa dextérité pianistique ni sur son inaltérable recul sur lui-même, preuve d’intelligence suprême ! Cet homme est une pépite musicale à lui seul et pouvoir l’applaudir « en solitaire » reste un privilège qu’il ne faut surtout pas rater !