L'Indépendant N°319
(supplément "Bol d'air")
15 novembre 2008

Disques
Entre Pink floyd et Stravinsky
William Sheller et ses "Avatars" inspirés
(par Jean-Paul Chaluleau)



Un album de Sheller est toujours un évènement. Avatars n’y échappe pas, sur fond de pop symphonique du meilleur effet. L’effet Sheller, depuis plus de trente ans…


Ne le cherchez pas dans les émissions de télévision, surtout celles qui consacrent l’apparence, souvent au détriment du talent. De même, ne tendez pas vraiment l’oreille pour tenter de capturer à la radio le dernier titre qu’il a composé. Quant à la presse people, elle ne s’intéressera jamais à cet étrange personnage sorti de l’ombre dans les années 70 et qui poursuit une carrière étonnante sans être détonnante. William Sheller n’a jamais apprécié une lumière intense sur son visage et sur son art, la musique. Souvenez-vous…

Des Irrésistibles au classique
Le premier succès, Sheller l’obtient par groupe interposé. La chanson ? My year is a day. Le groupe ? Les Irrésistibles. Cette composition de 1967 lui permet de se lancer dans la musique, sa passion. Sans reconnaissance immédiate, il patientera jusqu’en 1975 pour se révéler au grand public avec un Rock'n'dollars atypique. C’est la face visible d’un iceberg de notes. Parallèlement, William travaille pour Barbara (sur l’album La louve) et laisse parler ses influences classiques. Le cultissime album Lux aeterna (1972) en trace les contours. « Des compositeurs comme Chopin, Stravinsky, Schubert, Ravel sont des virtuoses qui faisaient ressortir l’âme du piano, et grâce à eux, j’ai appris la mélodie, la composition, les dissonances, le toucher », confie William Sheller à un confrère. Son goût prononcé pour le classique (Ostinato) ne l’empêche pas de signer des hits plus modernes (Oh ! j’cours tout seul, Dans un vieux Rock’n’roll). Ni de jongler entre musique électronique (Les machines absurdes), et piano-voix (Epures). Tout en laissant à la postérité un des plus beaux joyaux de la chanson française, Un homme heureux.

Noble variété
Cette variété, dans le sens le plus noble du terme, sert de fil conducteur à l’œuvre de William Sheller, musicien éclairé. S’il avoue que « La découverte des Beatles  a provoqué un séisme » en lui, il reste fidèle aux sillons des illustres compositeurs, tout en écoutant des groupes d’aujourd’hui comme les Arctic monkeys. Son dernier opus illustre parfaitement ces inspirations multiples explorées par ce Tintin tranquille à l’air toujours aussi mutin qu’il y a 33 ans, alors que son premier tube poussait la vox populi à le caser dans la catégorie des artistes éphémères. C’était sans compter sur la profondeur et l’authenticité de William Sheller. Sur sa belle liberté de composer aussi. Avatars en est l’exemple désormais le plus récent.

Critique
De bien beaux Avatars
(par Jean-Paul Chaluleau)


Avatars
, c’est donc le nom de code choisi par William Sheller pour son dernier album en date. Un album qui réunit l’essentiel de ses inspirations. Un disque qui, de l’avis même de son créateur, « tient autant de Pink Floyd que de Stravinsky. » L’album démarre d’ailleurs sur du classique légèrement habillé de pop (Avatar I). Il contient également un incontournable, un "tube" comme on disait naguère : Tout ira bien, rythmé à souhait. Jet lag s’inscrit dans cette lignée, en plus guitare. Dans la foulée, Tristan ramène l’auditeur sur les rives plus "violon", et Black mail se fait plus piano. Music-hall célèbre les cuivres, et Le veilleur de nuit nous tient bien éveillé, comme le très rock Camping ! Avatar II boucle le disque, ultime référence au classique, symphonie que l’on espère inachevée d’un artiste hors normes. Jusque dans le choix de la photo sur la pochette du CD…

* William Sheller- Avatars, CD Mercury.