Conseil général du Loiret
4 septembre 2005

William Sheller, de bonne composition




La boîte aux lettres indique simplement "Hand-Sheller", le nom de baptême, puis d'artiste, du musicien. Il a accepté de nous accueillir dans sa maison de Jouy-le-Potier pour évoquer avec nous plus de trente ans de carrière.


- "Pourquoi vous être installé à Jouy-le-Potier ?"
- "J'habite ici depuis quatre ans... Ça file à une vitesse ! J'avais fait appel à une boîte de graphistes orléanais pour un album. J'en ai profité pour visiter un peu la région. En rentrant à la capitale, j'ai demandé à mes enfants : "Qu'est-ce que vous faites encore à Paris ?". Depuis, j'ai même enregistré des albums ici. On entend les canards sur les bandes, les mouches qui passent la fenêtre... Dans un petit village, de voir moins de gens, on est plus attentif à ceux que l'on rencontre".

- "Ne craignez-vous pas de vous couper de l'actualité musicale ?"
- "Pas plus que ça. Je pense que vous êtes autant au courant que moi des nouveautés : en achetant des disques, en regardant ce qui passe à la télé, on en sait bien assez... De toute façon, même à Paris, c'est devenu difficile de rencontrer d'autres musiciens. Autrefois, les artistes se voyaient, échangeaient des idées. Aujourd'hui, ils travaillent avec un directeur marketing, pour devenir de "bons produits" ! Je vais tout de même au concert. J'aime beaucoup M, Bénabar, Calogero, Juliette..."

- "Vous êtes arrivé à la chanson par l'intermédiaire de Barbara. Pensez-vous que ce genre de rencontre soit irremplaçable ?"
- "Qu'il faille faire des rencontres, c'est évident. Mais des Barbara, il n'y en a pas beaucoup ! C'était une expérience assez particulière. Travailler avec elle, ça voulait dire habiter chez elle pendant six mois ! Mais ce n'était pas son genre d'étouffer les autres, elle essayait plutôt de faire ressortir ce qu'elle pressentait chez vous ! Quand je l'ai rencontrée, c'était pour travailler sur l'orchestration d'un de ses albums. C'est elle qui m'a poussé à écrire des chansons".

- "Comment travaillez-vous ?"
- "Je travaille chez moi, dans un tout petit cagibi, sans même un piano. Je traite tout avec mon ordinateur et un logiciel assez simple... la seule fenêtre est aveuglée, ce qui me permet de travailler sans voir passer le jour...ou la nuit. Je n'ai besoin de rien d'autre. La musique ne se conçoit pas, elle s'entend. Votre musique se situe aux confluences du classique, de la pop, de la chanson française..."

- "Quels sont les oeuvres qui vous ont marqué ?"
- "Voyons... Le Sacre du Printemps de Stravinsky, l'album Sergent Pepper's Lonely Hearts Club Band des Beatles et Le Marteau sans maître de Boulez. Mais pour faire le tour des influences musicales que je reconnais dans ma musique, il faudrait aussi indiquer les harmonies "antiques" de Fauré, dont mon maître était l'élève, Schumann et Chopin pour les modulations..."

- "Et pour les textes ?"
- "Je suis musicien, je produis de la musique. Une fois le travail de composition, d'arrangement terminé pour tout l'album, je me demande ce que je vais chanter là-dessus... Je n'ai pas l'urgence d'écrire un texte, comme celle de composer une musique. Alors je gratte, un peu comme pour dégager progressivement un tableau. J'arrive à mettre une bonne phrase à sa place, puis une autre. C'est vraiment très difficile d'écrire. Rendez-vous compte, les rimes en "ose", il y en a cinq. Après, ce ne sont que des maladies !"

- "Comment percevez-vous l'évolution de la musique au cours de vos trente années de carrière ?"
- "Les années soixante ont été une époque extraordinaire, un formidable creuset artistique qui a complètement modifié notre conception de la musique. Le problème, c'est que l'on continue à vivre et à créer sur le reliquat de cette période. C'est produit par les mêmes, des anciens jeunes, des vieux quoi... Je sais que c'est un peu paradoxal de dire ça, alors que j'ai plus de trente ans de métier derrière moi, mais je trouve tout cela vieux".

-"Au cours de votre carrière, vous avez abordé beaucoup de formes musicales différentes. Avez-vous encore en vue des expériences inédites ?"
- "Un opéra. Un vrai. Le plus difficile sera encore de trouver le sujet et le livret. Le texte reste une menace pour le musicien que je suis.."