Le Point N°1690
3 février 2005

Sheller avec grand orchestre
(par Sacha Reins)



CONCERT. Après un album minimaliste, Epures, on retrouve le compositeur-interprète aux Folies-Bergère puis en tournée.


Décontracté comme le type qui ne tient pas compte des règles tacites du music business, William Sheller fait sa rentrée scénique. Décalée par rapport à la sortie de son dernier album, Epures. Conçu et enregistré l'été dernier dans sa maison de Sologne, c'était un exercice minimaliste de piano-voix en neuf chansons et trois instrumentaux. Ceux qui attendent donc une tournée "épurée" en solitaire seront déconcertés, car c'est accompagné d'un orchestre de dix-huit musiciens -pour une rythmique qui sait ce qu'est la pulsation rock-, qu'il reprend la route. "Dans l'édition littéraire, dit-il, on ne s'étonne pas qu'un écrivain, après avoir publié un gros bouquin, sorte une plaquette de quelques nouvelles. C'est ce que fut Epures pour moi. Je voulais publier un truc vachement court, [l'album dure trente-trois minutes], intime. On attend la tournée qui le déclinerait en live. On ne peut rien publier gratuitement ou innocemment. Et cela m'emmerde".

Tout le prédisposait à faire carrière dans le classique. Etudes sous la houlette d'un disciple de Fauré. A 16 ans, il quitte le lycée et se consacre à la musique. Entré au Conservatoire, son professeur le préparait pour le grand prix de Rome quand une bombe fit sauter son univers. "J'ai entendu les Beatles, dit-il. J'entendais des mélodies et des sons nouveaux et je ne voulais pas leur tourner le dos. Ca se passait par là, avec les Beatles, Led Zeppelin, Procol Harum, Frank Zappa".Ce n'est pas par hasard qu'il cite exclusivement des musiciens pop ou rock ayant associé le classique à leurs oeuvres : il a lui-même slalomé entre rock et classique, passant du quatuor à cordes au groupe de hard, de l'orchestre symphonique au récital solo.

Il vit en Sologne et ne participe à aucun des évènements musicaux caritatifs qui mobilisent les télés. "Je ne suis pas très bon copain avec la clique, dit-il. Je ne suis pas rejeté, ils chantent mes chansons, mais on ne pense pas à me demander. Je suis à la marge". Il n'est pas étonnant que, sur les vingt-trois albums qu'il a enregistrés depuis 1972, le plus populaire soit En solitaire, dont la chanson phare s'intitule Un homme heureux. Il y a une logique dans le succès.