La Croix
19 janvier 2000

Tête d'affiche
Le retour magique de William Sheller
(par Patrick Lemoine)



Les années qui passent n’y changent rien : les notes de musique de William Sheller demeurent ensorceleuses. Après six ans de silence, l’auteur-compositeur quinquagénaire nous ravit toujours avec ses violons symphoniques mâtinés, parfois, de tonalités rock enrôleuses. Dans Indies, le deuxième titre de son nouvel album Les Machines absurdes, il y ajoute quand même des sonorités orientales -certainement indiennes- qui nous démontrent, une fois encore, la grande perméabilité de ce franco-américain à toutes les musiques du monde. Pour peu qu’elles soient en harmonie avec ses univers d’origine que sont la musique classique et le jazz. Et bien sûr raffinées ! Pour notre plus grand bonheur.
Violons, batterie, trompette, bombarde aussi, mais encore le piano qu’il affectionne tant, sont ainsi invités au rendez-vous de textes à la poésie affirmée. Sans concession, jamais, pour qu’ils s’inscrivent à la perfection dans cet art du contrepoint musical qui est le sien.
Parti en quête de nouvelles dissonances magiques depuis janvier 1994 et la parution de son précédent album, il nous revient avec des mélodies toujours aériennes qui nous promènent dans un univers musical limpide, au style parfaitement identifiable, bien que sans cesse renouvelé.
« Il n’y pousse que du bonheur », écrit-il dans Chamberwood, à propos de sa « vilaine maison ». Un « bonheur, à s’en faire des chansons ». Peut-être. Nous n’en saurons pas plus. Car cet homme-là est discret, férocement discret, et ce ne sont pas de très hypothétiques passages de ce jeune grand-père sur les plateaux de télé du show-business qui pourraient nous apprendre quoi que ce soit. William Sheller (dont le nom d’emprunt est la contraction de ceux de deux poètes : l’Anglais Shelley et l’allemand Schiller) ne se prête pas aux jeux de cette « machine absurde » à broyer de jeunes talents. Dans cette chanson-titre de son nouvel album, il confesse qu’il «  a peu d’aptitude à vouloir changer ». Même si « les gens, ça les dérange que je ne sache auquel ressembler ». Surtout, ne changez rien, aura-t-on envie de lui crier quand il viendra au-devant de nous, lors de sa prochaine tournée en France (29 janvier à mi-avril) et à l’Olympia (du 22 février au 2 mars).

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Les Machines absurdes. 1 CD Mercury 546922-2.