Platine N°46
Décembre 1997
-10ème Festival des Nuits de Champagne de Troyes autour de William Sheller, 26 octobre au 1er novembre 1997-

10èmes Nuits de Champagne
La plus grande chorale du monde !

(par Pierre-Henri Moreau et Jean-Pierre Pasqualini)

 


Les Francofolies, Chorus, Festi’Val de Marne, et autres festivals de chanson française vont devoir désormais compter avec ce festival champenois qui, parvenu à maturité, compte accéder à un rang national.

Créées en 1988 dans la très bourgeoise ville de Troyes, ces Nuits de Champagne se sont d’abord consacrées aux plus belles voix faisant l’actualité (lyrique, chanson, humour ou théâtre). Ensuite, en 1993, sous l’impulsion de Pierre-Marie Boccard, le festival s’est orienté vers le chant choral. Il se construit désormais autour d’un stage national où des choristes amateurs travaillent sur l’œuvre d’un nom de la chanson, et non plus sur du répertoire folklorique. Sur 7000 personnes inscrites dans des chorales en France, 1200 à 1500 sont revenues deux ou trois fois depuis cinq ans. 600 en moyenne payent chaque année 2500 francs pour suivre ce stage durant les vacances de la Toussaint, rencontrer un auteur-compositeur de référence et assister –éventuellement- à des spectacles (le passeport pour quatre concerts coûte 395 francs). A l’issue, ils peuvent même acquérir un cahier de petit format avec les arrangements… Le budget, lui, n’a pas bougé depuis dix ans : 4,5 millions de francs (1,5 de la ville, 350 000 du département, 150 000 de la région et 35 000 du Ministère de la Culture). Sans compter, depuis cinq ans, un million provenant des stagiaires.
En 1995, Berger (et Plamondon –Starmania-) et en 1996, Gainsbourg ont été commémorés. En 1993, Roda-Gil et Delanoë, en 1994 Le Forestier, et, cette année, Sheller se sont investis bénévolement. En retour, ils ont été travaillés par des chorales dont certaines comptent parmi les meilleures de France (Alès, Metz…). Suite à l’hommage à Berger, Foulquier a même « invité » les chorales aux Francofolies de Montréal…
Depuis quatre ans, c’est Jean-Michel Boris, de l’Olympia, qui programme des artistes, dans une demi-douzaine de salles de diverses capacités (de 450 à 2000 places) et ce, pour un public familial qui passe sans problème d’un genre à l’autre.
Les premières années, les artistes se produisaient à Troyes comme une étape de leur tournée. Désormais, ils ont compris qu’ils participaient à un évènement. Ils jouent donc le jeu et la magie ne manque pas. Cette année, Eicher a fait la dernière date de sa tournée, Julien Clerc, venu pour la seconde fois, n’a pas dit non à une future édition qui lui serait consacrée, Tri Yann a attiré 3000 personnes dans une salle de 2000 places, Enzo Enzo est venue avec Kent et François Bréant, Miossec a chanté Ma gueule avec Pascal Comelade, Gildas Arzel a cassé la baraque, accompagné par un Jean-Jacques Goldman discret et humble qui a même tenu à assister à la deuxième partie, le concert d’Axelle Red, laquelle (comme France Gall l’an dernier) a rôdé son Olympia…
Et si Khaled est passé un peu inaperçu, si l’Affaire Louis Trio a annulé, le festival a néanmoins été une réussite, entre la soirée d’ouverture par un Sheller au piano et la clôture par le même William, ému aux larmes. Réussite, dont la dernière soirée fut vraiment le point d’orgue : 600 choristes et Françoise Pollet, chantant vingt œuvres de Sheller : Oh ! j’cours tout seul, Rock’n’dollars, Le Carnet à spirale… En plus des arrangements vocaux et musicaux somptueux (Les Filles de l’aurore, Dans un vieux rock’n’roll), l’édition 1997 avait joué la carte de la mise en scène. Lorsqu’il est entré sur scène pour les rappels, c’est un William Sheller troublé qui n’a pas hésité à déclarer que son futur album serait très marqué par cette rencontre. Emotions nocturnes. Diurnes aussi, car deux jours de rencontre eurent lieu, dont une autour de l’arrangement avec Sheller et la participation de grands arrangeurs : Christian Gaubert, Jean Musy, Christian Chevallier… Animée par Alain Poulanges, celle-ci fut très suivie.
Alors, à qui seront dédiées les prochaines années ? Jean-Michel Boris n’hésite pas à jeter en l’air l’idée d’un festival autour de Souchon-Voulzy, de Goldman, de Nougaro… et pourquoi pas autour de la chanson populaire avec Michèle Torr et Frédéric François et un hommage à Joe Dassin… Pas si anachronique que ça, quand on a assisté à l’après-soirée de clôture du festival où, grâce au DJ Zouzou, les 600 choristes présents se sont entièrement lâchés sur Cloclo, Dalida et consœurs.
Ah ! Ces bulles qui vous montent à la tête une fois le coup de sabre passé !